Cher 2013 Bruère-Allichamps Vallenay

Chantier DRAC/SRA CENTRE n°190/13 du 25/03/2013

 

Retour  pour l’équipe de plongeurs sur  la zone  du  Cher  au niveau  d’un coude de la  rivière entre Allichamps et Vallenay.
(extrait Atlas de Trudaine)
Le Prieuré d’Allichamps est classé Monument Historique. C’est l’un de ses servants, l’Abbé Pajonnet, archéologue amateur mais néanmoins éclairé qui fut, juste avant la Révolution vers 1770, l’instigateur des recherches archéologiques autour  de ce bâtiment reconstruit sur  un temple  gallo-romain.
Depuis près de 250 ans, les fouilles archéologiques se sont succédées  et  ont  révélé  la richesse de l’endroit du Haut Empire jusqu’au Moyen Age. Seul le domaine aquatique avait été laissé de côté pour des raisons  de faisabilité. Il fallait donc poursuivre ce recueil  et suivi  de  l’Histoire  locale.
Les sarcophages sont assez répandus dans le Prieuré, autour de celui-ci mais vraisemblablement aussi dans la rivière toute proche.
La zone amont au niveau de la mise à l’eau des plongeurs.
C’est encore un peu plus haut qu’un franchissement antique devra être recherché lors d’une prochaine saison de prospections.
Après un premier rideau de végétation, les plongeurs doivent  s’affranchir d’une bande  assez large d’algues et autres plantes aquatiques pour atteindre le milieu du lit du Cher.
Une belle demi-meule à main en grès est découverte dans le lit du Cher. Elle est en grès bicolore du type des Meulières de St Christophe le Chaudry.
(Meule tournante, vue de la zone active)
Partie supérieure de la meule  par où le grain  était  introduit  dans l’oeillard.
Sur la circonférence, le trou correspondant au manche en bois par lequel la meule tournante était entraînée
Une plaque en grès a également été découverte.
Il s’agit d’un couvercle de sarcophage, sculpté d’une branche de croix pattée et d’autres motifs. Sarcophage antiquité tardive ou mérovingien, sculpté dans une pierre d’œuvre gallo-romaine réutilisée

15 août 2013

Cette première approche de la zone a révélé aux plongeurs que l’endroit était très intéressant. La couverture en plantes aquatiques de surface et au fond  est la seule difficulté rencontrée. L’observation est difficile dans les bancs d’algues .
Il sera nécessaire de retourner sur les lieux pour faire des relevés de la poutre et examiner plus méticuleusement des bancs d’algues et de plantes aquatiques qui peuvent retenir des objets intéressant l’archéologie. 

22 et 23 août 2013 : Reprise des prospections sur la zone d’Allichamps. Un changement est visible avec le débit du Cher. De 8 m3/s, nous voilà avec 2 m3/s c’est à dire pratiquement le débit et donc la hauteur la plus basse que l’on puisse trouver. Cette différence va servir et desservir les plongeurs. Il sera apprécié la clarté de l’eau et les découvertes intéressantes à la fois dans peu d’eau et à la fois en eau profonde et claire. D’un autre côté, les marches d’approche et mises à l’eau avec le poids du matériel passeront par des zones de vase profonde encombrées de plantes aquatiques très denses autant dire un accès assez éprouvant physiquement. Toutefois ces deux après-midi de prospection vont se révéler très intéressantes en matière de découvertes. Plusieurs sites vont être découverts, des meules, des aménagements différents en bois (pieux et poutres sablières), des zones comportant des morceaux de sarcophages, des endiguements. Cette prospection subaquatique dans la zone du Prieuré d’Allichamps, déjà très riche en découvertes archéologiques terrestres depuis plus de deux siècles, va venir compléter de façon très intéressante la partie aujourd’hui baignée par le Cher. Le Prieuré aujourd’hui pratiquement au bord  du Cher, pouvait initialement se trouver au centre d’un petit bourg, le Cher ayant un lit tracé différemment.
Le lit du Cher pour diverses raisons notamment techniques n’a jamais été visité, le rôle de l’équipe de plongeurs archéologues trouve ici toute son efficacité et son intérêt.

Les conditions: Temps ensoleillé presque caniculaire avec près de 30° à l’extérieur et 22° dans l’eau, des zones d’eau calme, des zones étroites où le courant devait se frayer un chemin et donc  avoir un bon coup de palme était nécessaire aux plongeurs qui ont pu gérer cela sans difficulté. Les zones prospectées allaient de quelques centimètres d’eau à plus 2m malgré cette période d’étiage estival. Le débit était de 2 m3/s.  

Avec 2 m3/s des zones assez grandes deviennent de véritables bourbiers enchevêtrés de plantes aquatiques.
Avant de se mettre à l’eau les plongeurs examinent quand même des parties de la rive où les zones sont difficilement accessibles pour des non plongeurs. Ils resteront sur leur faim car  la  tâche n’est pas facile avec juste une observation de surface en prospection.
Lorsque l’on dit que c’est dur  pour les plongeurs, ça l’est aussi pour le matériel.
Une autre approche et une autre mise à l’eau seront  décidées  pour le  deuxième jour.
Dés le départ, des endiguements en rive gauche vont attirer les plongeurs. Ils n’ont pas été mis ici pour rien. Ces ouvrages vont révéler des installations anciennes en rive opposée.
Au nombre de deux, il est difficile de les remettre dans un contexte de bâti.
Divers aménagements sont visibles et devront être interprétés.
Un morceau de meule est découvert dans le Cher, en rive droite, en face d’un des endiguements. Il pourrait s’agir d’un morceau de meule à main .
Dans la partie la plus amont qui  a été prospectée, il est découvert une demi meule d’un moulin hydraulique. Meule assez épaisse et dissymétrique. Son diamètre avoisine 80cm.
En rive droite, dans ce qui deviendra un site intéressant en raison des découvertes d’aménagements en bois, il est découvert une autre demi meule. Sa position dans la typologie des meules à main nous apprendra sa période d’utilisation.
Cette zone en rive droite va se  révéler intéressante.
Plusieurs ouvrages en bois vont être trouvés assez groupés.
Ici on peut deviner un pieu couché dans le lit du Cher près d’un autre morceau de meule encore. Indiquant une activité de meunerie à cet endroit.
Plantés dans le substrat à la verticale et ne dépassant que de quelques centimètres du fond, ou dépassant de façon plus importante en position couchée, il est découvert 36   »bois » (pieux et poutres). Il est évident que nous sommes en présence de plusieurs structures.
Non seulement on note la présence de pieux, de poutres sablières mais aussi peut-être des poutres massives de charpente, toujours dans le même périmètre.
Deux morceaux de sarcophages présentant chacun une loge céphalique. Il n’est pas exclus qu’il puisse s’agir de réemploi .
Le balisage et marquage des pièces de bois commencent à se dessiner sur le fond.
Plus d’une trentaine de pièces de bois sont ainsi découvertes sur une zone déterminée, avec des morceaux de sarcophages et des meules.
Toujours au milieu de la zone, une possible meule hydraulique partiellement enfouie, elle est en position verticale et un pieu  ou axe en bois est fiché dans l’œillard.
Le bois est-il ici de façon fortuite ou s’agit-il d’un système ou mécanisme en place ? C’est difficile à dire, notre opération de simple prospection ne nous permet pas de creuser et de l’extraire pour étudier le dispositif pour le moment.
Un retour sur place l’an prochain  est à envisager avec une autorisation adaptée.
Enfouie debout, s’il est confirmé qu’il s’agit bien d’une meule, elle est très usée. Elle semble  être en grès.
Très intéressant, à peine sortie de la berge et visible, l’extrémité d’une poutre sablière apparaît.
Elle présente au moins une mortaise perforante au travers de laquelle un pieu apparaît.
Cette poutre est en place, nous sommes donc bien sur une structure hydraulique en place.
Une tête de pieu érodé maintien toujours la poutre, l’assemblage est toujours présent.
Plus en aval, la mise en place de  bouées permet aux plongeurs de cerner une zone dans laquelle il est relevé des indices d’habitat. Plusieurs morceaux de sarcophages sont vus, un pieu bien planter dans le substrat, des blocs taillés et même un bloc maçonné, une tuile à rebord sont également présents.
Un morceau de sarcophage auquel une balise a été fixée pour une matérialisation en surface.
Un autre morceau de sarcophage parmi d’autres qui matérialisent une zone de nécropole aujourd’hui sous les eaux du Cher.
(profondeur -1m60).
Un morceau de tuile à rebord.
Un morceau de couvercle de sarcophage est prélevé. il présente des traces de sculptures. (croix ?)
Un peu plus en aval de cette dernière zone, deux pieux assez imposants sont fichés dans la berge. La première hypothèse soulevée pourrait être en rapport avec un possible ponton  pour un franchissement type bac. Cette supposition peut ce confirmer avec le micro toponyme de la parcelle juste derrière : Le champ du marin !
Une attention particulière est portée sur ce dispositif. depuis la rive d’en face, on distingue un aménagement de la berge. Sur un affleurement d’une roche calcaire assez dure, on voit que les pieux se trouvent à l’abri derrière un petit îlot. La roche a été taillée volontairement pour aménager un abri, un embarcadère ou plus spécifiquement un port.
Toujours depuis la rive gauche, on distingue qu’il existe une sorte d’accès aménagé autour de l’îlot central autorisant ou protégeant un accès à droite ou à gauche.
Depuis la rive droite, les pieux dans leur zone abritée.
Vue en rive droite, la végétation encombre un peu le site mais l’aménagement est  reconnaissable.
S’il fallait appuyer les hypothèses émises, la recherche aux AD18 permettent de relever  sur un plan ancien de la DEE daté du 1808, des appellations de « Port » au niveau de la zone des deux pieux en rive droite.
Le Seigneur de Bigny lui-même, Seigneur de  St Amand également, propriétaire du Moulin des Bordes, devait bien posséder un bateau (bac) lui permettant de traverser le Cher pour se déplacer sur ses terres et propriétés. Une datation C14 est envisagée pour dater ce dispositif.
En rive gauche, un peu en amont de la digue du Moulin des Bordes, nous avions signalé à la DRAC Centre en 2011, la présence d’une poutre sablière basse prise dans la berge. Cette année, elle est incluse dans notre zone de prospection, cette pièce méritait un examen.
En 2011, lors de sa découverte,  cette poutre était déjà prise dans la berge mais présentait une partie aérienne visible longue de 9m. Aujourd’hui un effondrement de la berge l’a partiellement recouverte. Sa partie visible  mesure 6m70.
Difficile, sans sondage, de dire si elle est en place ou non.
Elle a fait l’objet d’un relevé pour un dessin même s’il n’est que partiel sur la longueur. Il s’agit quand même d’une pièce remarquable dans ses mensurations.
Plusieurs mortaises de belles tailles sont visibles, toutefois l’érosion du bois ne permet  pas de déterminer s’il existe des angles d’assemblage pour les pieux.
Un prélèvement a été réalisé en vue de faire faire une datation au Carbone 14.
Les mortaises sont simples ou doubles. Mesurant près de 40cm, elles laissent supposer un ouvrage de grande taille et solide.
L’effondrement de la berge depuis 2011 nous prive des cotes réelles et complètes de cette poutre.
D’un autre côté, l’amas de terre maintien la pièce de bois sur son emplacement actuel.
Une petite visite de la zone amont du site amène la découverte d’autres poutres sablières basses. Elles sont hors zone désignée par notre mission 2013, toutefois, situées à quelques dizaines de mètres de notre site, elles vont faire l’objet d’un signalement à la DRAC Centre qui sera mentionné dans le rapport.
Couchée sur le côté, cette première poutre est spectaculaire avec ses 10m50 de long. Posée sur un banc de gravier, partiellement recouverte  de végétaux aquatiques elle n’apparaît qu’en période de basses eaux comme en ce moment.
Elle est placée dans l’alignement du courant, à une vingtaine de mètres en aval une seconde poutre est visible, elle est prise dans le banc de gravier.
La seconde poutre est plus massive que la précédente, plus large, elle est prise dans le gravier.
Mortaises de 30cm confirment la robustesse de l’ouvrage initial.

Il reste encore beaucoup de choses à faire sur ce tronçon du Cher à Allichamps. Il existe plusieurs sites dans cette courbe ou méandre de la rivière. Il faudra très probablement y revenir avec d’autres missions spécifiques de fouilles ou sondages qui permettraient la mise en évidence des assemblages de bois positionnant des moulins. La prochaine intervention sur ce terrain devrait se faire dans les semaines à venir avant le retour de fortes eaux, au moins pour positionner les dernières découvertes par un topographe.

25 août 2013

08 septembre 2013 : Sortie  bien spécifique  aujourd’hui,  il s’agissait  de positionner  le site et  les découvertes sur celui-ci avec un topographe afin de pouvoir faire figurer ces emplacements sur les plans actuels. Cette signalisation permettra de donner l’ampleur du village d’Allichamps et les structures, essentiellement hydrauliques dans le cadre de nos recherches subaquatiques. Contemporaines ou successives, ces installations seront confirmées dans une période grâce aux analyses au Carbone 14 et en comparaison avec la typologie des meules déjà connues et répertoriées. 

Les conditions: Temps alternant éclaircies et couvertures nuageuses qui réduisaient un peu la visibilité dans l’eau avec les turbidités présentes. La température extérieure avait bien baissé après les fortes chaleurs des plongées précédentes mais l’eau était encore à 20°C rendant les conditions de plongées encore assez faciles. Le débit du Cher était toujours constant à 2 M 3/s.

Retrouver les repères et marques laissés lors des plongées précédentes n’a posé aucune difficulté grâce au relevé manuel effectué.
Le topographe est en place à un  endroit précis permettent d’avoir une vue directe sur l’ensemble du chantier à relever tant amont qu’aval.
Il s’agit de placer une perche sur chacun des pieux à relever. Certains à peine affleurant du substrat font l’objet d’une seule mesure, d’autres pieux, plus longs  et effondrés doivent être mesurés ou relevés avec une cote haute et une basse.
Le relevé manuel réalisé lors des plongées précédentes est très utile pour organiser la levée des cotes topographiques.
Premières mesures dans la partie amont et  peu profonde du site. Les autres mesures se feront en eau profonde, en aval, vers les bouées blanches visibles en arrière plan.
Les endiguements empierrés présents en face du site, en rive opposée, sont également relevés pour apporter  de la précision dans la  description et la configuration  du site.

Un petit clin d’oeil à la Biologie Subaquatique avec quelques photos prises sur notre chantier.

Même en eau douce il existe des éponges, associées à une algue, elle peut prendre cette couleur verte en fonction de la profondeur (ici 1m60).
(Spongilla lacustris)
La même éponge d’eau douce mais au lieu d’être sous une forme branchue (photo précédente), elle est en plaque ou croûte.
(Spongilla lacustris)
Nous avons eu un contrôle !
Un petit goujon (Gobio gobio ) réputé rare dans nos rivières selon les pêcheurs, il est venu lire nos mesures et voir ce que nous faisions dans son habitat !!

 

 

Goujons (Gobio gobio)  et gardons (Rutilus rutilus)  cohabitent  et sont curieux auprès des plongeurs.